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anastasia

Le cœur brisé

Le 10/05/2024

Il paraît que ça existe, oui, en vrai. Un gros chagrin, un effort dépassant l’entendement, ce vaillant muscle si petit  explose,  évidemment nous avec. Pour de bon ou pour un temps restant à déterminer.  J’en connais un bout  et non des moindres. Envie de penser à un moindre, les gros seraient lourds à revivre, attention danger.
Donc j’ai vécu, travailler,  aimé, pleurer de joie ou de chagrin pendant un demi-siècle à  Paris.  L’avoir  quitté c’est ma blessure.  Profonde, non létale, quoique...Je n’ai plus l’impression de vivre depuis. . Toutes les nuits je rêve que je vis encore là, dans un Paris reconstruit de briques de mes émotions.  Rien à voir ou si peu avec la réalité. Heureusement d’ailleurs.  Elle a bigrement changé ma ville. Normal,  le temps impose sa loi implacable.  Vous imaginez que j’ai changé aussi et non en mieux  ha ! ha ! Mon cœur ne geint pas après les clichés habituels : la baguette sous le bras, le comptoir en zinc des bistrots,  le pousse-café des travailleurs trop tôt reveillés..le Pied de cochon quand cela te chante, jour ou nuit, .les remarques acidulées d’un Marcel Aimé de passage.....  Non. Aujourd'hui on les a rendu surannés, kitsch sucré,  discretement idicules.  En héritage pour la province, et encore..faut chercher ..Non. Je lutte en catimini contre la tendance qui nous guette tous de confondre le temps avec l’espace. Ni temps passés ni les amours reviennent pleurait un poète mieux que moi ( beaucoup mieux...)
Pourtant je regarde ahurie à la télé les images de l’actualité.  Ma ville  chérie  a changé de décor,  de costumes,  de scénario. Au point de devenir méconnaissable pour l’écran de ma mémoire. Et pour quelques vieux  touristes  en quête d’un passé disparu. Allons  ma vieille,  pense avec un peu de bon sens à ce lieu où  les dimensions temporelles n’ont plus cours. Il est là,  devant  mes yeux attendris l’olivier, sépulture des miens et qui sera là mienne aussi.  On n’aurait pas pu choisir  mieux,  n’est-ce pas ?

 

Je me bats contre les moulins à vent

Le 03/04/2024

On est une armée considérable,  je sais. N’empêche,  l’état physique,  mon état, m’a réduit - pour l’instant  je l’espère- à marcher comme une guenon, pliée en  deux les bras presque touchant terre.  L’avatar d’une pauvre petite dame que j’avais vue il y a une éternité au Bois de Boulogne.  Moi, orgueilleuse, promenant ma belle dalmatiene , elle sûrement courant à tombeau  ouvert tout en essayant  de prolonger les délais. Et ben, me voilà  à sa place, me traînant d’un coin à  l’autre de mon appartement.  Perdue la forêt,  la dalmatiene, les années de l’insouciance et du bonheur. 
On est ainsi fait pourtant,  on veut remonter la roue du destin. Quitte à payer en douleurs,  réparations coûteuses.... pour rien. Les jambes ne me portent plus, la colonne vertébrale en chewing-gum,  les yeux nécessitant des bésicles de plus en plus  performantes. Je retiens jalousement les souvenirs éparpillés qui veulent  bien rester encore un peu dans ma mémoire boiteuse.  Ce n’est pas pour  rien  que mon héros préféré est Don Quichotte.

 

Le temps des souvenirs

Le 03/04/2024

Pas perdues ! Les autres vont tomber dans le gouffre de l’oubli....
Il m’en reste pas mal quand même.  Des cocasses,  celles qui font de moi le pitre d’une soirée  entre amis....De plus en plus rares.... les amis, les souvenirs. Et leur envie d’écouter.... des fois je sais que je me répète mais le plaisir de raconter, l’espérance de l’effet sur les auditeurs, me font appuyer sur l’accélérateur. 
(To be continued évidemment)

 

Traîtres souvenirs

Le 18/03/2024

Sans crier gare je me sens poussée dans un espèce de coupe-gorge..... Il y a des moments quand tout revient en vrac, me saute dessus, je suis poignardée et j’étouffe sous ce déferlement de souffrance. Mes souvenirs sont forcément merveilleux,  adorables. C’était ma jeunesse, je me croyais invincible sinon éternelle pareil à  tous les autres  que je cherissais.  D’autant plus meurtrier.... L’absence,  la conscience de la finitude, du départ programmé collé à  l’incertitude de l’arrivage, tout est poison, outrage à  mon Moi qui ne veut pas céder à  cette  inexorable pression. 
Bref, connaissez vous un secret, un gimmik pour stopper l’avalanche  ? Moi, j’ai tout essayé,  nouvelles amitiés, nouveaux paysages,  techniques asiatiques pour découpler le mental du passé, du présent et même de l’avenir. Rien, rien n’est efficace vraiment. 
Méfiez-vous, ne prenez rien à la lettre,  je jongle en saltimbanque avec mes journées.  Il y en a où j’oublie de penser, de ressentir quoi que ce soit. Je joue au  légume,  cela me sied parfaitement. Par malheur le coupe-gorge me guette,  à un moment où à un autre je finis par y tomber.  No country for old man (or woman, n’est-ce pas ?)

 

Le printemps, un des derniers ?!

Le 16/03/2024

Autant que je m’en souvienne le printemps était ma saison  favorite. Un frémissement hormonal peut être.... J’attendais sans savoir quoi, de petits miracles ? Va savoir....J’avais la sensation de changer  de peau comme les reptiles.  Chaque bourgeon,  chaque piaillement  des volatiles  parsemait l’air encore frais prêt  à  se laisser  inondé par les rayons douces du soleil, réveillé  du sommeil hivernal.... Tout me poussait vers un état amoureux.  De quoi, de qui ? Quelle importance ! Le printemps me rendait la joie d’être tout simplement et remplissait mes attentes d’un aura mystérieux. 

Aujourd’hui  mon regard éteint, même  pas triste, juste absent, traverse depuis ma chambre, univers presque obligé dorénavant,  les vitres généreuses -un vrai cinéma du réel - offrant  en cadeau  le vol des goélands,  tellement  beaux,  si occupés par leurs affaires printanières. Pas seuls, il y a les pigeons qui  choisissent l’âme sœur,  certaines fleurs  qui poussent timidement,  tant de réveils, d’arrivages,  des cris de joie. Moi, aucun frémissement,  exit les hormones ! Pas de demande amoureuse, l’attente jadis joyeuse s’est mué en angoisse. Je sens que la nature me renvoie un salut amical et prémonitoire. Patiemment elle  attend que je la rejoigne poussière,  brise ou ...rien du tout. Le vide, le noir, si des fois  on pourra  apprécier les couleurs. Encore  un bonheur de perdu sur le chemin des années.  Passées quand ? Où  ? J’ai la mémoire qui flanche dit et bien dit la chanson....Le hic, mon cœur n’a pas envie  de chanter cette chanson-là....

 

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